Accompagnateurs et formation des responsables

Cet article a été publié pour la première fois pour la tribune Fonda en 2017 par Paul Bucau, Chargé de Développement territorial au RNMA.

La formation des responsables associatifs connaît un large panel de déploiements possibles d’un bout à l’autre du pays. Elle est proposée ici par des acteurs de l’éducation populaire, là par des acteurs du développement social urbain ou du développement rural, ailleurs par des associations locales, des « MDA », ou encore par des services municipaux dédiés à la vie associative…

Ces portes d’entrée peuvent porter un label Crib (Centre ressource d’information des bénévoles) ou une dénomination Pava (Point d’appui à la vie associative) mais ce n’est pas systématique. Si l’enjeu est globalement reconnu par les différents niveaux de la puissance publique, l’organisation territoriale d’une offre de formation va dépendre du contexte et de l’histoire de chaque bassin de vie au sein duquel elle s’inscrit, puisqu’elle est le fruit d’une analyse des besoins menée par des professionnel-le-s de terrain, qui la proposent et la font évoluer au contact des associations qu’ils-elles côtoient et des diagnostics des partenaires locaux.


Construire l’offre de formation

Quand on parcourt les offres des structures d’appui, certains sujets ressortent communément : communication, comptabilité, recherche de financement, l’animation de réunions ou encore l’organisation d’un événement... Mais les réalités du tissu associatif peuvent aussi amener les structures à élaborer des propositions spécifiques localement. On peut citer par exemple le droit à l’image à l’Espace associatif de Quimper Cornouaille ou les financements européens à la MDA de Lille. Dans leur rôle de structuration de l’offre de formation, au-delà des contenus, les professionnels de terrain font face à plusieurs challenges : le financement de l’offre, l’identification des intervenants compétents, l’articulation territoriale avec d’autres propositions ou encore la capacité à élargir le public touché. On peut parler d’un métier d’accompagnateur-trice de la vie associative locale, avec ses compétences et ses ingénieries spécifiques, sans qui les bénévoles associatifs pourraient se retrouver livrés à eux-mêmes et ne pas activer les parcours de montée en compétence. Voici un aperçu du rôle de ces professionnels. 


Les éléments préalables à une offre qui rencontre son public

Le travail quotidien effectué par les accompagnateurs, à partir d’entretiens individuels et/ou de temps collectif, leur permet à la fois d’identifier le besoin d’acquisition de compétence des bénévoles associatifs, mais aussi d’en faire prendre conscience par les porteurs de projets associatifs eux-mêmes, selon une posture pédagogique que Guillaume Hardy, accompagnateur à Quimper, replace au cœur du métier : « L’accompagnement tel qu’il est proposé par l’Espace associatif repose sur le fait qu’accompagner est un acte pédagogique vis-à-vis des bénévoles associatifs. » Pour que les dispositifs de formation déployés rencontrent leur public, la qualité de la relation avec les bénévoles et la posture des professionnels sont des éléments importants. Loïc Basset, accompagnateur à l’AGLCA (Maison des associations) à Bourg-en-Bresse, évoque en d’autres termes ce travail « amont » de la diffusion d’une offre de formation : « Au-delà de transmettre du contenu et des compétences, faire prendre conscience qu’il faut se former et en savoir plus est une étape indispensable. » Il cite l’importance des « relais de mobilisation », comme par exemple, quand le greffe des associations de l’Ain invite les nouvelles associations créées à une rencontre avec le correspondant de la Direction départementale de la cohésion sociale, et les acteurs de l’accompagnement tel l’AGLCA.


L’articulation territoriale

Les espaces d’interconnaissance entre les professionnels d’un même bassin de vie sont très précieux afin d’optimiser le service rendu sur territoire par la multiplicité des acteurs proposant de la formation. Au niveau départemental, les Missions d’accueil et d’information des associations (Maia) portées par les Directions départementales de la cohésion sociale (DDCS), s’efforcent de construire une complémentarité entre structures d’appui. Loïc Basset nous explique que dans l’Ain « le Raia (Ndlr : équivalent de la Maia) permet de garder en vue ce que font les autres, d’éviter de faire des formations en doublon ou en concurrence. Si ce lieu n’existait pas, il y aurait des frictions entre les structures. »
Un travail de plusieurs années a permis aux publics visés de cerner l’offre et aux acteurs de l’accompagnement d’affirmer et de reconnaître leurs spécificités respectives (public jeune, secteur sportif…). Florence Michelland, conseillère éducation populaire et jeunesse à la DDCS, qui coordonne la Maia sur l’Isère, nous explique qu’elle laisse les structures s’auto-organiser quant à la formation car elle effectue plutôt une veille sur l’identification de nouvelles portes d’entrée qui apparaissent sur le territoire, là où l’offre est moins dense, à la recherche d’une meilleure couverture territoriale. Loïc Basset de l’AGLCA témoigne de la même logique : « Quand des directeurs de centre sociaux ou des élus à la vie associative nous sollicitent, nous montons une formation de base pour toucher ces nouveaux territoires, elle permet de nouer le premier contact, et par la suite de développer d’autres modules sur place, ou bien que les associations touchées viennent directement à l’AGLCA. »


L’adaptation de dispositifs nationaux à des enjeux locaux

Le Certificat de formation à la gestion associative (CFGA), dispositif reconnaissant des compétences dans un cadre réglementé, fait l’objet d’adaptations spécifiques par les accompagnateurs de la vie associative locale. Agathe Defretin de la MDA de Tourcoing nous parle du « CFGA Jeunes » : « le CFGA ne les attirait pas de prime abord, on a essayé de casser les codes. On illustre l’apport théorique du jour en faisant intervenir des associations du territoire, des jeunes qui ont déjà suivi le dispositif et donnent des exemples concrets. (…) En visitant chaque jour de formation un point d’appui différent de l’agglomération, on permet aux jeunes d’identifier les ressources de leur territoire. (…) Ils peuvent faire la période de stage dans leur association, ce qui nous permet par le travail de tutorat sur leur projet de vérifier si les fondamentaux ont été acquis. (…) On constate que les liens perdurent après le CFGA entre les jeunes et que leurs associations deviennent partenaires. » On perçoit comment un dispositif a priori normé est dessiné sur-mesure de la patte des accompagnateurs de la vie associative locale pour répondre à plusieurs enjeux : connaissance du territoire, mise en réseau et coopérations, intégration dans un parcours de suivi…


La conquête à venir du territoire numérique

Les accompagnateurs revendiquent la qualité de la relation avec les responsables associatifs et attestent du succès de leur approche globale. Ainsi, si la numérisation diversifie les formats et peut accroître les publics touchés, la formation en ligne amputerait la palette des accompagnateurs d’une option, celle des interactions. Pour les structures d’appui locales, l’équation de la formation en ligne des responsables associatifs est difficile à résoudre. Pourtant, à Amiens, la Maison des associations d’Amiens métropole (MAAM) et un comité d’acteurs locaux ont relevé le défi en concevant une plate-forme d’e-learning doté initialement de treize modules reprenant les thématiques clés. Un déploiement porté en 2016 sur quatre territoires par des maisons des associations permet d’expérimenter des modèles de complémentarité entre le « à distance » et le présentiel. Il est encore tôt pour tirer les conclusions mais on sent que les modèles de demain sont en train de se construire pour conjuguer la puissance de diffusion du numérique et la globalité de l’action des structures d’appui.


Formation et autonomie associative

Si la formation s’insère dans une panoplie d’actions plus large que les accompagnateurs conçoivent et articulent, Guillaume Hardy nous en dit plus sur sa finalité : « Cet accompagnement se fait donc selon différentes modalités (conseil, animation d’atelier, formation, mise en ligne d’informations, mise en réseau…) qui ont toutes en commun d’avoir pour finalité de permettre aux bénévoles d’agir et de développer leurs projets de manière autonome et sécurisée. » Un objectif visé ici et dans lequel se reconnaissent bien d’autres structures d’appui est celui de l’autonomie associative : elle sous-entend de rendre les dirigeants bénévoles capables de comprendre leur environnement, de maîtriser les dimensions gestionnaires et administratives devenues indispensables au développement de projets associatifs, de penser leur action pour qu’elle réponde aux objectifs visés…
Posons-nous alors la question du sens de toutes ces actions et réinterrogeons les profils d’acteurs qui proposent ces formations, cités en début d’article de manière non exhaustive. Ils ne sont pas des acteurs traditionnels de la formation professionnelle. Il est évident que les enjeux sont autres que l’employabilité des personnes. Il est difficile de résister à la tentation de conclure en citant les propos de Luc de Backer, ancien président du Réseau national des maisons des associations et président d’honneur de la maison des associations de Tourcoing : « Se former grâce aux associations pour être pleinement acteurs dans la société, c’est une véritable démarche d’éducation populaire. »


Catégories
Accompagnement, Co-construction et développement local

Typologies
Analyses & Théorie, Cas pratiques & témoignages

Maisons
MAAM (Maison des Associations d'Amiens Métropole), AGLCA - Maison de la Culture et de la Citoyenneté de Bourg-en-Bresse

Date de publication
16/06/2017

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